L’absence de documents d’archives empêche de connaître la date de construction de ce moulin. La dendrochronologie (science de la datation des vieux bois) a permis de déterminer que les poutres du rez-de-chaussée qui soutiennent l’ensemble du mécanisme proviennent d’arbres coupés aux alentours de 1630 ; l’arbre moteur en chêne, de bois coupés vers 1750. Quelques piliers remontent à 1802. Il s’agit donc d’un monument composite, d’origine ancienne, évoquant une histoire mouvementée.
En effet, ce moulin n’a pas toujours été situé à son emplacement actuel. Au XIXe siècle, alors qu’il était la propriété de la famille BÉLARD (d’où sa dénomination de « moulin à vent de BÉLARD »), le moulin était implanté au n° 10 de l’avenue des Pyrénées (côté droit lorsqu’on circule en direction de Sainte-Foy-de-Peyrolières, 60 mètres après la casse automobile), au coin de la rue des sources. Il a été déplacé brique par brique sur le site actuel – dit « le pigeonnier de Delhom » – suite à une décision du Conseil municipal prise en 1884, le moulin étant situé trop près de la route : le mouvement des ailes effrayait les attelages de chevaux. Sa reconstruction s’effectua sur le terrain actuel qui venait d’être acheté par la famille BÉLARD, terrain à l’époque éloigné de toute habitation.
Abandonné en 1947, sans aile ni toit et avec une tour fendue, le moulin a bien failli être démoli. En 1994, sur la pression du conseiller municipal Denis SICARD, le Maire Jacques TROYES obtint du propriétaire qu’il fit don à la commune de la bâtisse en ruine. L’« Association pour la réhabilitation du moulin de Saint-Lys » fut alors créée et, en 1995, une convention tripartite fut signée entre la commune (propriétaire du bâtiment, qui fournirait les matériaux), l’AFPA de Toulouse-Bordelongue (pour l’exécution des travaux portant sur les parties en bois) et le Président de l’association (maître d’oeuvre). Le moulin rénové fut officiellement inauguré par la municipalité le samedi 10 avril 1999 (en même temps que le boulodrome couvert et la Médiathèque municipale), en présence de Pierre IZARD, Président du Conseil Général de la Haute-Garonne.
Le moulin à vent de Bélard avant.
Le moulin à vent de Bélard maintenant.
Construit en briques foraines larges et minces de couleur rouge, typiques des monuments du Midi toulousain, le moulin laisse apparaître sur ses murs des « trous de boulin » (ou opes), petites excavations ayant servi à loger les poutres d’échafaudage en bois utilisées lors de la construction (puis des restaurations) de l’édifice. Les pierres calcaires, moins friables que les briques, étaient utilisées pour une partie de l’encadrement des portes afin de supporter les gonds, créant une agréable bichromie.
À la base de la fenêtre supérieure, les briques ne sont pas bien intégrées au reste de la tour car elles pouvaient être enlevées pour agrandir la fenêtre et permettre ainsi de monter les meules, trop grandes pour passer ailleurs, lors de leur remplacement. Cela se produisait deux ou trois fois par siècle, selon l’utilisation, pour les meules en silex.
De longues planches de mélèze des Pyrénées recouvrent le toit : ce bois imprégné de résine est l’un de ceux qui résistent le mieux aux intempéries.
Pour que les ailes puissent être placées face au vent, le toit (d’un poids de 9 tonnes) peut pivoter sur une ceinture de chêne, « sablière » graissée au « suif » grâce à une longue poutre de bois (la queue ou le gouvernail) qui descend du sommet jusque près du sol.
Les ailes en chêne sont portées par un arbre moteur également en chêne, terminé par un bloc de fonte. Elles sont vrillées comme une hélice d’avion ou de bateau pour que le vent frappe les voiles en biais et fasse tourner les ailes. Mais pourquoi l’arbre moteur est-il incliné (environ 15°) ? Tout d’abord, cela stabilise l’ensemble car les ailes pèsent beaucoup plus lourd que la queue. Ensuite, il ne faut pas que les ailes frottent sur la base de la tour en fléchissant sous le vent. Mais surtout, quand une aile est en bas, le vent qui frappe la tour revient sur l’arrière de la voile : plus elle est proche du mur, plus elle perd de sa puissance.
Lorsque le vent souffle à moins de 30 km/h, on ne peut pas moudre. Au-delà de 60 km/h, cela devient dangereux. Il y a donc peu de jours favorables : à peine un jour sur cinq.
Pour faire la farine, les grains sont broyés entre une meule supérieure, dite « tournante », et une meule « dormante » (fixe). La meule tournante est composée de quatre blocs de silex sertis en cercle comme une roue de charrette.
À l’aide d’un système de leviers (« la trempure »), le meunier soulève la meule supérieure (1800 kg environ) de moins d’un centimètre pour faire démarrer le moulin, puis la rapproche de la meule fixe pour faire de la farine quand le grain descend de la « trémie » vers l’« auget » agité par la rotation du gros fer et tombe dans l’« oeillard » de la meule. Sous l’effet du vent, les ailes tournent dans le sens des aiguilles d’une montre. Pour que les grains et la farine soient envoyés vers l’extérieur de la meule par la force centrifuge, sa vitesse de rotation doit être supérieure à 40 tours/minute mais rester limitée.
La farine sort par une ouverture dans le coffre qui entoure les meules et tombe dans la « huche ». Il n’y a plus qu’à la tamiser pour éliminer l’enveloppe des grains qui est fibreuse et ne passe pas au travers des mailles du tamis.
Le moulin de Saint-Lys ayant une vocation pédagogique et touristique, il reçoit des groupes qui seraient déçus de ne pas voir faire de la farine. Un moteur électrique de 7,5 Kw a donc été installé sous les meules, permettant de faire de la farine sans rotation des ailes les jours sans vent.
Extraits tirés de l’ouvrage SICARD (Michel), « Les moulins de Saint-Lys ».
(consultable à la Médiathèque municipale de Saint-Lys)
Publié par l’« Association pour la réhabilitation du moulin de Saint-Lys »,
Imprimerie Sodal, Langon, sans date [2006], 27 pages, 10,00 €.