Des logements préfabriqués à Saint-Lys pour les rapatriés d’Algérie
Il y a 55 ans, le cessez-le-feu signé le 19 mars 1962 entre la France et l’Algérie indépendante entraina le départ d’un million de citoyens français vers la métropole : les pouvoirs publics durent leur prévoir des lieux d’accueil sur tout le territoire national.
En novembre 1962, le Maire René BASTIDE répondit très favorablement à une sollicitation du Préfet qui demandait si un terrain communal pourrait servir d’assise à des logements préfabriqués « pour y loger les Rapatriés les plus défavorisés. »
En mai 1963, l’entreprise toulousaine FOURNÈS fut désignée par le nouveau Maire Pierre VERDIER pour édifier 20 pavillons préfabriqués légers en bois de type « Domino », sous la supervision de l’architecte toulousain Erwin SCHULZ de l’agence « Groupe 6 – Architecture, urbanisme, études techniques ». Le 17 juin 1963, le Maire signa avec l’État une convention pour l’édification de 7 logements F-4 (54,59 m2 chacun), 8 F-5 (62,94 m2) et 5 F-6 (71,89 m2), « à réserver exclusivement, pendant une durée minimale de dix ans, au profit de personnes ayant la qualité de rapatriés d’Algérie », désignées par le Préfet et devant bénéficier de loyers identiques à ceux des HLM. La ville devait faire exécuter les travaux de viabilisation du terrain (32.234 francs), d’électrification (19.500 francs), de construction des logements (555.800 francs) et régler les frais d’honoraires de l’architecte (5.000 francs), de gestion et d’entretien. En retour, la commune bénéficierait d’une subvention de l’État (523.000 francs) puis percevrait les loyers pour son propre compte. La ville dut néanmoins contracter un emprunt de 60.000 francs auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations.
La municipalité choisit un terrain communal de 7360 m2 situé rive gauche de l’Ayguebelle, aux abords de l’actuel boulodrome couvert. Les travaux débutèrent à l’été 1963 et les procès-verbaux de réception provisoire furent signés en février et mars 1964. D’après un « État des demandes de logements de rapatriés » du 20 avril 1964, 36 familles, soit 89 adultes et 61 enfants, s’étaient déclarées pour l’obtention de l’un des 20 préfabriqués. Sur ces 36 familles, 19 résidaient déjà à Saint-Lys et 9 dans d’autres communes du canton. Les trois familles les plus éloignées résidaient à Lyon, dans l’Ain et en Eure-et-Loir.
Les rapatriés retenus par les autorités intégrèrent leurs nouveaux logements à partir du 1er juin 1964. Au 1er avril 1965, cinq familles avaient déjà quittés ces habitations mais toutes avaient été aussitôt remplacées par d’autres rapatriés. Au 3 juillet 1965, les 20 pavillons étaient tous occupés et comptaient en tout 104 habitants.
Le 5 février 1969, la municipalité évoqua la construction de 25 logements HLM rue de l’Ayguebelle et la « nécessité de poursuivre une politique de logements en raison des demandes de location et surtout en raison de pourvoir au relogement des rapatriés qui demeurent dans les préfabriqués actuels et dont l’état de ces bâtiments donnent des inquiétudes quant à la solidité et l’humidité toujours croissante. » Dès octobre 1969, la mairie obtint du Préfet l’autorisation de reloger les locataires de 6 préfabriqués dans des appartements HLM de la commune. De novembre 1970 à septembre 1980, les préfabriqués furent peu à peu libérés puis vendus à des particuliers pour être transportés ailleurs. Au 31 juillet 1975, plus aucun rapatrié n’habitait ces chalets et seule une famille nécessiteuse de la commune fut autorisée à s’installer pour plusieurs mois dans un F-5.
Un seul pavillon F-6 resta propriété communale : sur décision du Conseil municipal du 7 septembre 1980, il fut transporté sur l’autre rive de l’Ayguebelle en bordure du terrain de boules et mis à la disposition du « SLO-Pétanque », où il remplit cette fonction encore aujourd’hui.
Ancien logement préfabriqué type F-6, déplacé et mis à la disposition de la section « Pétanque » du « Saint-Lys Olympique » par une délibération du Conseil municipal votée le 7 septembre 1980 (Photographie prise le mardi 1er mars 2016 par Madame Armelle FERNANDEZ, du service « Pôle culturel » de la Mairie de Saint-Lys).
Photographie aérienne de Saint-Lys (non datée : probablement prise à la fin des années 1960 ou au début des années 1970) sur laquelle on peut voir, en haut à gauche de la vue, le lotissement des rapatriés, aux toitures d’une couleur bleue-grise (Carte postale, collection particulière).
Extrait du plan de situation réalisé en avril 1963 par l’architecte Erwin SCHULZ pour l’implantation des vingt logements préfabriqués à Saint-Lys, sur la rive gauche de l’Ayguebelle
Archives communales de Saint-Lys, 16 W 2
« Photographie prise vers le milieu des années 1960, montrant la rue de l’Ayguebelle vue depuis la route de Toulouse avec, à droite, les bâtiments de la « Cité radio » et, à gauche, les préfabriqués pour les rapatriés. »
Vue du village dans les années 1960, avec, visible dans la partie inférieure droite de la photographie, l’un des logements destinés aux rapatriés lorsque ces préfabriqués se trouvaient encore à leur emplacement originel (carte postale, collection particulière).
Le souvenir de la « cité des rapatriés », aujourd’hui disparue, est conservé sur cette plaque d’un transformateur électrique situé avenue de Gascogne, en rive droite du ruisseau du Mescurt (photo prise le 20 août 2020).