L’actuelle place Jean-Moulin est une création relativement récente : jusqu’à la fin du XIXe siècle, plusieurs maisons étaient bâties sur son emplacement, conformément à l’organisation urbaine initialement prévue lors de la création de la bastide au Moyen-Âge.
Il y a 130 ans, le projet de réalisation de ce nouvel espace public n’alla pas sans entraîner une polémique au sein même du Conseil municipal, voire parmi la population. Lors du Conseil municipal du 29 février 1880, un des élus, M. MAGENTHIÈS, déclara : « […] par deux différentes fois, M. le Maire, à des époques déjà reculées, a proposé au Conseil l’achat de tout ou partie d’un moulon de maisons destiné à donner à Saint-Lys une nouvelle place, et que par deux fois différentes le Conseil a rejeté cette proposition, faisant sagement entrevoir à M. Baylac l’inopportunité de la demande, à cause même des malheureuses circonstances qui incombent à la commune, tant à cause des sacrifices volontaires que se sont imposés les habitants que des impôts fortuits qui les grèvent les uns et les autres en vue de la reconstruction de leur église. »
Le Maire ayant renouvelé le souhait de concrétiser ce projet, M. MAGENTHIÈS « déplora d’autant cette opiniâtreté qu’elle [était] de nature à détruire l’harmonie du conseil lui-même, et, ce qui [était] plus grave, à produire le désordre dans la commune ». Ce conseiller municipal alla jusqu’à proposer l’organisation d’un référendum local pour trancher cette question, « vu l’importance de l’affaire qui lui paraît brûlante en elle-même, tant elle touche de près aux intérêts des habitants ; vu les graves conséquences qu’elle pourrait entraîner à sa suite ». Le 11 juillet 1881, ce même élu refusa de voter un crédit supplémentaire destiné à la célébration de la fête nationale du 14 juillet : « M. MAGENTHIÈS dit qu’il ne peut se résoudre à voter des fonds pour une fête nationale, quand la commune se trouve aussi divisée qu’elle l’est par le fait du projet de création d’une nouvelle place mis en avant par M. le Maire ».
À la suite à de nouvelles élections municipales, Bernard BAYLAC revint à son idée de création d’une nouvelle place publique. Le 7 mai 1882, le Maire faisait le constat suivant : « Des plaintes nombreuses se produisent journellement sur l’exiguïté des places publiques de la ville; les jours de foires et marchés nous montrent l’insuffisance de l’emplacement occupé par les marchands étalagistes ; les alentours de la place couverte ne sont plus en rapport avec l’importance toujours croissante du commerce local, et l’inconvénient qui résulte d’une agglomération importante renfermée dans un centre étroit, où les accidents ne sont évités que par une surveillance incessante, nous fait voir enfin combien il est urgent de parer à cet état de choses. »
Le Conseil municipal se prononça alors en faveur de la création d’une nouvelle place publique (nommée aujourd’hui « Jean-Moulin »), par l’acquisition puis la destruction de maisons (estimées 19 000,00 francs) situées sur cet îlot. L’enquête commodo et incommodo ordonnée par le Sous-Préfet le 15 mai suivant n’ayant soulevé aucune opposition, les travaux débutèrent à la fin de 1882.
Le 27 mai 1883, les crédits furent votés pour la construction de l’escalier reliant la nouvelle place à la « rue de Débat » (aujourd’hui : « du 11 novembre 1918 ») et d’un mur de soutènement pour compenser le dénivelé.
Le 14 février 1886, le Conseil municipal délibéra pour qu’un nouveau bureau de Poste soit édifié à Saint-Lys : l’emplacement retenu fut celui de la place nouvellement créée. L’administration des Postes prit possession de ses nouveaux locaux en mai 1888.
La place Jean-Moulin était désignée, dans les registres municipaux des années 1886 et 1887 (soit juste après sa création), par plusieurs noms : « Place de la Grand’rue », « Nouvelle place publique, dite de la République », ou encore « Place de la volaille » car c’est sur cet espace public que se tenaient les marchés où se vendaient les volatiles de basse-cour. C’est cette dernière dénomination qui resta en vigueur jusqu’en 1970, année où lui fut attribué son nom actuel.
Place de la volaille un jour de marché : vue prise entre 1900 et 1920.
La place de la volaille vers 1950.
La cloche municipale qui annonçait le début et la fin du marché de la volaille.
Le bureau de Poste au début du XXe siècle.
Le bureau de Poste vers 1970.
Vue actuelle de la place Jean Moulin
Vue actuelle de la place Jean Moulin